Lettre ouverte à Isabelle Chevalley

Madame,
Il n’est pas dans mes habitudes d’utiliser les media pour communiquer ni d’étaler sur la place publique les doléances que je pourrais avoir envers une tierce personne. Pourtant, il me semble aujourd’hui nécessaire de réagir aux propos que vous avez tenus lors de la session du 13 septembre dernier du Grand Conseil vaudois.
Cette assemblée avait à traiter, au point 11 de son ordre du jour, du rapport du Conseil d’Etat sur le postulat Métraux (Eole dans le Gros de Vaud) et l’interpellation Amarelle (clarifications concernant l’implantation de parcs éoliens dans l’Arc jurassien). Dans la discussion qui a suivi la lecture de ce rapport, la députée Claudine Dind a relevé la volonté du Conseil d’Etat de préserver la qualité du cadre de vie. Elle a également fait mention de mon rapport récemment paru sur les « Eoliennes et la santé humaine » qui met en évidence la nécessité de faire preuve de prudence dans le choix des sites d’implantation d’éoliennes industrielles, eu égard notamment aux effets nocifs que pourraient avoir les infrasons sur les riverains.
Votre réponse à cette intervention fut à la mesure de ce que vous inspirent les personnes qui, contrairement à vous ne sont pas à la solde de l’industrie du vent, véhémente et méprisante, pour ne pas dire diffamatoire.
Vos attaques sur ma crédibilité scientifique sont sans fondement et inadmissibles.
Vous prétendez avoir passé une journée entière à me lire et à lire les auteurs que je cite (89 références). Vous lisez vite…, ou mal… Pour ma part, j’ai mis près de deux mois à préparer et rédiger ce rapport. Je dois être lente… ou consciencieuse…
Vous prétendez que la plupart de ces auteurs disent le contraire de ce que j’avance et que j’utilise habilement leurs propos. C’est mensonger et insultant. Seules de rares études, et notamment celle de Colby et al. que je cite d’ailleurs, réfutent réellement l’existence de problèmes liés à la proximité d’éoliennes industrielles. Et il faut savoir que leur étude a été mandatée par l’American Wind Energy Association et par la Canadian Wind Energy Association, deux des plus grands promoteurs mondiaux de l’énergie éolienne…
Vous précisez aussi que j’habite à 1800 mètres des éoliennes du Peuchapatte. C’est exact. Trop près selon vous pour ne pas être influencée. Influencée par quoi au juste ? Par les infrasons ?
Les personnes qui se plaignent des nuisances sonores des éoliennes vivent à quelques centaines de mètres de celles-ci. Je ne souffre pas de ce genre de nuisances. Le seul impact que les éoliennes du Peuchapatte pourraient avoir sur moi serait éventuellement visuel. Mais manque de chance, Madame, je fais partie de ceux pour qui l’impact visuel des éoliennes est secondaire et acceptable, au vu des défis énergétiques qui nous attendent.
Contrairement à ce que vous avez ensuite expliqué au député Bertrand Clot, je ne souffre ni de l’effet nocébo, ni de troubles somatoformes. Je n’ai pas de doléances personnelles vis-à-vis des éoliennes et ne fait partie d’aucun groupe d’opposants.
Ma seule motivation dans ce dossier est d’ordre citoyen. Je m’implique pour que les instances politiques soient informées correctement et complètement et pour que les collectivités publiques soient respectées et consultées.
Je m’implique aussi pour que l'implantation d'éoliennes ne serve pas d'alibi à de grands groupes industriels pour continuer d'augmenter la production d'électricité et pour que les promoteurs du vent cessent d’utiliser des méthodes inacceptables dans leur course au profit qui n’a strictement rien à voir avec un quelconque souci d’écologie (cf. émission « Mise au point » du 11 septembre 2011).

Pour terminer, et si je fais abstraction de vos réelles motivations, je tiens encore à vous dire, Madame, que votre croisade pour les éoliennes aurait pu être exemplaire, notamment grâce à vos facultés d’oratrice. Malheureusement, cette force finira par devenir une faiblesse à cause de votre propension à utiliser la mauvaise foi, le mépris et la suffisance. A méditer en cette période électorale…

Nicole Lachat, Dr ès sciences, députée suppléante, Le Noirmont, JU.